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  • Le gang del Bombo

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    C’était Luigi qui les avait nommés ainsi.  Simplement parce qu’à chaque fois qu’ils entraient en ville dans leur fourgon, un bruit vrombissant, pareil à celui d’un bourdon, (Bombo en italien) les devançait. C’est aussi parce que, tels des bombes, ils se distinguaient par leur élégance qui ne laissait aucune femme indifférente.
    Et enfin, parce que chacun de leurs prénoms s’achevait par la lettre O.

    Luigi adorait faire durer le O pour le faire résonner quand il en parlait : La banda del Bombooooo

    Ils s’étaient connus en maison de correction et en avait tellement bavé que l’expérience les avait soudés à jamais.  Personne n’avait su ce qu’il s’y était vraiment passé mais depuis leur sortie, rien n’avait pu les diviser.

     

    A Castelmezzano et dans les 50 kilomètres à la ronde, tout le monde les respectait.

    Ils faisaient trembler les chaumières et parce qu’aucun habitant n’était parvenu à les détrôner, personne n’aurait vu les choses autrement : les 7 membres du gang del Bombo étaient LA référence dans le craché de noyaux d’olives. 

    Chacun avait sa technique. Vincenzo prenait de l’élan. Domenico faisait vriller le noyau avec sa langue avant de l’expulser. Marcello faisait gonfler son ventre de manière impressionnante pour décupler le souffle d’envoi. Riccardo plaçait le noyau à la verticale pour optimiser l’aerodynamisme. Donatello l’envoyait à 70 degré. Maurizio effectuait un mouvement de tête  de gauche à droite  très rapide pour lui donner de l’élan.  Et Leandro usait de ses deux mains qu’il claquait sur ses joues pour impulser l’expulsion.

    Leur réputation les précédait depuis près de 50 ans.

     

    Et puis un jour, le gang est tombé. Ou plutôt, le game fut plié.
    Il faut dire que le changement climatique altérait de manière croissante la production d’olives. D’année en année, l’olive s’amenuisait, devenait plus maigrelette, plus sèche et son noyau plus petit, plus léger. La discipline perdait de son attractivité du fait de performances de moins en moins spectaculaires.

    Et c’est à Matera que la légende de la Banda del Bombo a pris fin.

    A cause d’un espagnol, Tito El Frances, venu s’installer avec sa guitare. Ce n’est pas tant son don pour la musique Flamenca que les damoiselles des alentours écoutaient en se trémoussant, qui fit tomber le gang, que l’invention qui faisait sa réputation : une machine à lancer les jambons.

    Tito avait mis des années à la perfectionner. Il n'en faisait pas une fierté. Celle-ci n'avait d'ailleurs jamais réellement servi. Elle ne lui constituait finalement qu'un prétexte pour raconter ses aventures et faire rire les femmes en manque d'exotisme et de légéreté.

     

    Un soir plus arrosé que les autres, alors qu’ils dégustaient ensemble un jambon du cru, Tito (et son accent ibérique), racontant son amour pour le porc noir de Bigorre et son savoir-faire de la découpe, avait présenté sa fameuse machine à Giacomo Mancini, le maire du village.

    Au milieu du jardin, il avait stabilisé la catapulte et avait expédié le jambon à plus de 20 mètres. Epaté par l’invention, Giacomo avait très rapidement vu l’opportunité de développer l’attractivité de son fief.  Le concours du lancer de jambon italien était créé.

    La curiosité et l’idée de renouveler le genre avaient fait le reste. Les alentours s’y étaient pressés et des équipes de femmes s’ étaient même formées. 

    Le jour du concours, Maurizio, Domenico, Leandro, Vincenzo, Marcello, Riccardo et Donatello étaient arrivés, cravatés, peignés,  parfumés dans leur fourgon vrombissant.  Ils s’étaient assis dans les gradins au milieu des spectateurs, saluant respectueusement Tito d’un geste de la main. On les avait applaudis. Comme il se devait.

    Et au premier lancé de jambon, mené par une équipe féminine, face à un tel spectacle et à l'enthousiasme de la foule, ils s’étaient tournés les uns vers les autres, avaient souri discrètement d'un air complice, comme pour se confirmer que l’histoire était terminée.

    L'Espagne avait planté sa corne dans le Mezzogiorno, l’olive avait laissé sa place au jambon et leurs moustaches & cravates aux sourires & cheveux détachés de jeunes femmes vraiment douées !

    Mais, une idée germait déjà dans leurs têtes ...

    Un jour, organiserait-on
    peut-être le lancer de jambon fourré aux olives ou encore le craché d'olives bardées de jambon !!!

     

     

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