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Yvon & Anastassiia

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Je vous présente Yvon… En dessous, c’est Anastassiia, son second amour.
Yvon, il avait d’abord connu Henriette. Henriette, c’était son amour de jeunesse. Ils s’étaient connus au lycée. Pas dans la meme classe, mais ils avaient la meme bande de potes.
Ils trainaient des après-midis entiers au « Jockey », l’un des rares bars sympas et ouverts de Rigomont-Floutère, la ville où ils vivaient. Là-bas, on y servait des bières au mètres et le patron savait faire de son endroit un lieu qui attirait les jeunes de bonnes familles. Yvon adorait passer du temps avec Henriette, au coin de la table du fond. Ils y jouaient au Yams.
Mais c’est à la « Berge » qu’Yvon avait fait le pas. « La Berge » c’était cette discothèque où ces mêmes bandes de potes finissaient leurs nuits à danser. Yvon, il connaissait Pierre, le videur de la boite, ce qui lui permettait d’entrer systématiquement, quel que soit son état.
A « la Berge », Yvon, il avait invité Henriette à danser un « slow ». Cette danse qui permettait de se rapprocher de l’autre, et qui consistait à tourner à pas modérés sur soi-même, plus ou moins blottis l’un contre l’autre, 3 voire 7 minutes selon le morceau qui passait.
Lui, c’est « Nothing compares to U » de Sinead O’Connor qu’il préférait. La musique était douce et pourtant rythmée et les paroles rappelaient que même séparés, il était difficile d’oublier l’autre.
Ce soir là, le DJ avait passé le morceau.
Alors Yvon, il avait timidement invité Henriette. Pendant tout le morceau, ils ne s’étaient rien dit. Yvon, il ne savait pas comment faire ni quoi dire. A 19 ans, c’est pas toujours simple !
Yvon, il connaissait le morceau par cœur. Alors, au moment où Sinead O’Connor pronnoncait « another try » en montant dans les gammes, il savait qu’il lui restait moins d’une minute. Il avait saisi alors sa chance, comme il pouvait. Sans dire un mot : il avait embrassé Henriette.
Et c’est ainsi que tout avait commencé entre eux.
Ont suivi des mois entiers de rigolades, de complicité. Ils faisaient leurs études en parallèle sans pour autant se projeter.
Yvon, les pieds, c’était son truc. Alors, podologie, pour lui, c’était logique.
Henriette, elle, elle avait choisi l’ingénierie. La diffraction sur un cristal.. c’était ça, son truc à elle….
Ils profitaient de ce temps béni des études où les préoccupations ne sont pas encore « sérieuses ». Et puis, est venu le temps du premier emploi.
Yvon, comme il s’entendait bien avec Mr Mouchaboeuf, le podologue vieillissant de Rigomont-Floutère, c’était assez naturellement qu’il avait décidé de reprendre sa clientèle et de s’installer. Et puis, Rigomont-Floutère, c’était quand même toute sa vie.
Mais pour Henriette, ce n’était pas à Rigomont-Floutère que les choses se profilaient. La diffraction des rayons, vous le savez, c’est dans un synchrotron que ça se pratique. Et à Rigomont-Floutère, la municipalité n’avait pas spécialement prévu d’implanter un synchrotron dans les 10 années à venir, même si Henriette avait -à maintes reprises- vanté l’avenir stratégique d’un tel projet à Monsieur Wandesloot, le maire qu’elle connaissait bien. Alors, quand le synchrotron de Giff sur Ivette lui a proposé d’endosser la responsabilité du projet « X pray », elle n’a pas hésité.
Et même si Yvon, elle l’aimait vraiment, elle ne se voyait pas rester dans les Ardennes et abandonner son rêve de contribuer à la science.
Ils s’étaient alors quittés.
Dans un premier temps, ca avait été vachement dur pour Yvon. Il avait essayé de maintenir le lien par téléphone, mais Henriette, elle passait son temps avec des ingénieurs talentueux qui donnaient une dimension tout autre à ses journées que celle que, lui, de son coté, vivait.
Le temps a alors fait son travail. Yvon et Henriette se sont perdus de vue.
Et c’est en 1982 qu’Yvon a rencontré Anastassiia. "Rencontré" n’est probablement pas le terme.
« a été percuté par Anastassiia » serait plus approprié !
J’vous raconte …
Un soir, lors d’un diner chez des amis, elle était arrivée en retard, au bras de Franck, l’un de leurs amis, Commercial chez Pirelli. Franck, c’était le beau gosse de la bande : toujours impeccablement fringué, gominé, bronzé. Le genre de copain qui épate par son verbe et son aisance, celui à qui tout réussit, mais qui ne sait ni vivre seul, ni rester plus de 3 mois avec la même femme.
Et sa femme du moment, c’était Anastassiia. Un « avion de chasse », ainsi que ces messieurs la qualifiaient dans leurs discussions privées. Elle était bulgare d’origine et travaillait comme lui chez Pirelli, mais à la Compta. Et c’est comme ca que Franck l’avait « chopée », un soir où il ne restait personne dans l’usine. Il s’en était, bien-sûr, largement vanté, détaillant autant le contexte (le bureau, la photocopieuse..) que la technique (vous devinerez !), un autre soir de palabres entre bonhommes.
A la seconde où Anastassiia était entrée dans le salon, ce soir là, et même si, toute la soirée, elle n’avait pas décollé de Franck, Yvon avait su qu’ils étaient faits l’un pour l’autre.
Plus la soirée avançait, plus Yvon détestait Franck à le voir se comporter de la sorte avec Anastassia. Quiconque les observait pouvait comprendre que Franck ne voyait en elle qu’un faire-valoir qu’il méprisait par ailleurs : la femme-objet qui le rendait remarquable. Et pour cause, elle l’était !!
Sa chevelure auburn, ses grands yeux sombres. Et cet accent … Sans compter l’histoire qui était la sienne : complexe, rude, courageuse.. et qui faisait d’elle une femme que l’on avait envie de protéger.
2 jours après le fameux diner, Yvon, convaincu de ce que son cœur lui dictait, avait bravé ses valeurs (approcher la femme d’un copain, ca ne devrait pas se faire !) et avait écrit à Anastassiia.
Pour rester discret, il avait pris le parti d’envoyer son courrier à l’adresse du service Compta qu’elle occupait seule. Il était sûr du fait que Franck, les courriers de la compta, il ne les lirait pas. Et puis, il savait aussi qu’Anastassiia, à cet endroit, n’en ferait pas grand bruit.
Il avait pris sa plus belle plume pour lui dire combien elle le troublait, pourquoi il refusait de garder cela pour lui, comment il s'effacerait tout aussi discrètement si elle ne consentait pas à la réciproque, et à quel point il était sûr de ce qu’ils avaient à partager… . Il lui avait aussi raconté sa très mauvaise conscience à agir de la sorte et surtout, son envie irrépressible de l’embrasser.
Au bout d’une semaine, Anastassiia lui avait répondu. Par courrier également. Elle trouvait à cela un charme suranné terriblement romantique que Franck ne savait lui offrir et qui lui plaisait.
Elle avait une très belle écriture et ses mots, couchés sur le papier, ne laissaient en rien deviner son origine bulgare et l’accent qui la trahissait. Elle avait choisi des mots doux pour lui avouer un élan réciproque et cette même « mauvaise » conscience qui, elle aussi, la taraudait.
De longues semaines d’échanges épistolaires avaient suivi, sans qu’ils décident de se rencontrer.
Et puis, n’y tenant plus, ils s’étaient retrouvés.
De cette fameuse « première » journée qu’ils passèrent ensemble, je ne vous raconterai rien, préférant vous laisser imaginer.
Ce que je peux vous dire, aujourd’hui, c’est que plus tard, ils se marièrent. Eurent ensemble une fille qu’ils prénommèrent Birgit (c’était le nom de l’arrière grand-mère d’Anastassiia).
Birgit, plus tard s’était elle-même mariée avec Jean-Fred. Jean-Fred avait une influence délétère sur Birgit qu’il blâmait, ridiculisait, maltraitait souvent en public.
Jean-Fred avait éloigné Birgit de ses parents, la manipulant de sorte a ce que leurs relations se détériorent.
Elle n’avait pas revu ses parents jusqu’au décès d’Yvon.
Jean-Fred avait permis a Birgit de préparer les obsèques avec sa mère Anastassiia. Birgit avait choisi une pierre tombale simple et décidé d’y graver une jolie croix en or.
Plus tard, était venu le tour de Anastassiia, qui les avait quittés à 90 ans.
Jean-Fred, devenu plus aigre encore, avait refusé à Birgit de dépenser davantage pour les obsèques de Anastassiia. Birgit avait alors trouvé un prestataire au rabais pour créer une photo de même facture que celle qu’elle avait créée, à l’époque, pour son père Yvon.
Que ses parents soient tous deux présentés en photo sur leur tombe était important pour elle.
Mais au bout de qqes semaines, la photo, mal réalisée et mal fixée, était tombée. Et parce que dans leur couple, c’est Jean-Fred qui avait autorité et qu'il refusait de "dépenser un Kopeck de plus pour ses connards de beaux-parents", Anastassiia n’avait trouvé d’autre moyen que de la fixer avec du ruban adhésif.
Chaque semaine, pendant que Jean-Fred fait du vélo avec ses potes, Anastassiia vient se recueillir sur la tombe de ses parents et replacer la photo avec du scotch...
Sa façon à elle de maintenir la famille en place et de rendre hommage à l’enfance pleine de joies qu’elle avait connue grâce à eux et qu’elle ne connaissait désormais plus depuis longtemps.
Voilà pour Yvon et Anastassiia, enfin, si vous acceptez que je les imagine ainsi !!!
Je vous en raconterai davantage sur eux plus tard. D'autant que cette question de ruban adhésif me turlupine ...
Mais je vous donnerai le fond de ma pensée plus tard.
Parce que là, maintenant, c'est mon propre père qui me cherche, hélant dans la maison. Il souhaite que je lui confirme que -je cite- « les sirènes, c’est bien dans l’Odyssée ?».
Je me suis alors entendue lui répondre spontanément à travers les murs qui nous séparent « as-tu consulté Google ? »…
... et depuis qqes minutes, la mauvaise conscience m’envahit. Je vous quitte pour filer échanger de vive voix avec lui.
Se parler / palabrer avec son père, profiter l'un de l'autre, c’est mieux que de trainer l'un sur google, l'autre sur Facebook, alors qu'un simple mur vous sépare à peine, tout de même, Surtout en cette période !!
 
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