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Une histoire de commodités

Allez … j’vous raconte. Ca fera probablement votre journée, comme disent les anglich !
Sur cette photo, c’est la tête d’une gagnante !
La poire d’une fille qui a de la chance !
La bouille d’une nana à qui cette journée va réussir !
Bref ma gueule !!

 

J’ai pris cette photo ce matin, dans les toilettes du Ministère (de l’agriculture et l’alimentation), vers 9:10, à ce moment très précis où je comprenais que ma journée prenait un curieux tournant.


Un rendez-vous professionnel courant, des toilettes, rien de particulier jusque-là, me direz-vous. On est mardi, la journée commence... pas de quoi prendre une photo !

Sauf que dans ces toilettes, au moment de la photo, j’y suis depuis 8:00. Enfin 7:57, pour être parfaitement précise.
Je m’y étais isolée pour dompter une chevelure hirsute -promesse quotidienne faite à ceux qui portent un casque de scooter- et me laver les mains, juste avant de serrer celles du grand directeur avec qui j'avais rendez-vous, du genre important et très sérieux, qui devait débuter à 8h15.

Capillairement remise en ordre et manuellement propre donc, j’escomptais sortir naturellement de ce que j’intitule, avec un goût très suranné j’en conviens, « les commodités».
Mais il se trouve qu’ici, de commodités ce lieu n’en avait que le nom.

J’ai eu beau tourner la poignée, tripatouiller le loquet du verrou, tirer, pousser, soulever, faire pression sur le côté, souffler dans la serrure (qui sait ?!), tapoter, exercer toutes sortes de mouvements, essayer d’insérer une carte plastique, même une clé. ... rien n’y faisait… la porte ne s’ouvrait pas. J’étais coincée !

Ce que ne dit pas encore l’histoire, c’est que j’étais dans des « commodités » particulièrement isolées du hall d’entrée, distancée par au moins deux autres portes d’un sas supplémentaire.
Autrement dit, j’étais très très très seule. Et vous imaginerez qu’à cette heure là, dans un ministère, il n’y a pas beaucoup de circulation. En tous cas surtout pas celle du gardien du bâtiment qui m’avait accueillie à l’entrée et qui devait s’être rendormi depuis.

J’avais beau frapper la porte (avec la distinction que l’on se doit cependant d’avoir dans un ministère), hausser la voix pour solliciter de l’aide, bref me manifester, il n’y avait absolument aucune âme qui vive pour m’entendre !!!

Me vint alors l’idée d’appeler mon ‘rendez-vous’ par téléphone pour expliquer mon retard, et ma cocasse situation, par la même occasion.
Redoublant de malchance, je n’avais que le numéro du standard. Et là encore, je ne vous apprendrai rien : avant 9 heures du matin, il est impensable de compter sur un standard d’administration française !

J’espérais que des sonneries prolongées attireraient l’attention. L’éventualité de quelqu’un qui passerait par là et qui ne supporterait plus la sonnerie du téléphone… le gardien, peut-être..

J’ai ensuite compté sur les membres de mon équipe qui remuaient ciel et terre pour trouver le numéro direct de mon hote. Vous comprendrez que les coordonnées d’un homme de cette fonction – ni même celles de son cabinet - ne se trouvent sur internet !

L’histoire a voulu que j’accède enfin à une interlocutrice standardiste à …. 9h17 !!!
Quand on est à ce stade de l’attente, qui plus est dans ma situation, à savoir dans des toilettes certes spacieux mais très blancs et très froids, je peux vous dire que chaque seconde est pesée, mesurée, comptabilisée.

Une interlocutrice, donc !! Mais quoi dire ? Comment ne pas susciter l’incrédulité voire l’hilarité, sans entacher l’image respectable que ma fonction implique ?
Et puis, vous en connaissez beaucoup, vous, des standardistes de ministères, suffisamment cortexées et ouvertes d’esprit pour comprendre que, la personne qu’elles ont présentement en ligne et qui leur raconte être le rendez-vous du grand patron qui devait se tenir il y a 1 heure, est coincée dans les toilettes quelques mètres plus loin ?

Bah celle que j’avais au téléphone n’avait certainement pas inventé le strapontin !
Croyant presque à un canular, je la sentais prête à raccrocher.

Je lui demande alors de vérifier mon nom dans l’agenda ainsi que le rendez-vous auquel j’étais tenue, et même probablement très attendue.
Elle consent ainsi à me passer l’assistante dudit patron, par téléphone, plutôt que de se déplacer jusqu’aux « commodités ».
Inconcevable pour elle d’imaginer que je suis effectivement en train de l’appeler depuis les toilettes juste derrière … ou inacceptable de se voir sollicitée pour une tache qui ne lui revient pas ?? Je ne saurai jamais…

Quoi qu’il en soit, elle transfert donc mon appel. Derrière mon téléphone, j’espère. Vous imaginez bien !
Maaaaaiiiis je comprends rapidement que le téléphone sonne dans le vide, à attendre ainsi. Probablement est-ce que mon rendez-vous et sa collaboratrice sont déjà en place dans une salle de réunion dans laquelle ils doivent m’attendre en pestant et ne sont donc pas ou plus derrière leur téléphone.
Ou peut-être même mon rdv a-t-il abandonné pour passer à une autre préoccupation. O combien je le comprendrais, vu l’heure !

Me voici alors de nouveau basculée sur ma standardiste préférée !

À ce stade de l’histoire, je vous rappelle que je suis toujours coincée dans les toilettes, désormais assise sur la cuvette !!

Vous ne me croirez probablement pas, tant cette histoire est grotesque et improbable… mais je n’en suis sortie que vers 9h50, grâce à un passant inespéré et à ses très forts coups d’épaule qui ont permis de débloquer la serrure, et de me faire sortir, par la même occasion.

Imaginez alors le malaise qu’a provoqué mon histoire quand mon sauveur, après avoir écouté mon récit, est allé voir la standardiste pour la réprimander.

Imaginez ensuite ce même malaise lorsque l’histoire a été portée à la connaissance de mon interlocuteur (qui ne m’attendait plus).
Je regrette de n’avoir pas vu sa réaction, lui grand directeur, haut fonctionnaire de l’État et homme pressé au demeurant, à qui la standardiste, après avoir préalablement déjà décrit la situation à l’assistante, tentait d’expliquer pourquoi elle n’avait rien initié pour résoudre la situation. (Je devine qu’elle a dù se prendre un savon au regard des très très très plates excuses qu’il m’adressait ensuite)

Imaginez enfin mon propre malaise quand, montée dans les étages en même tant que la rumeur de mon aventure, et réconfortée d’un bon café, il m’a fallu finalement assurer l’exercice du rendez-vous, en l’état des choses (j’étais là pour défendre et justifier un très gros budget).

Je suis finalement sortie de son bureau à 11h10 !!

En somme, une belle performance pour un échange qui ne devait durer que 20 minutes...

La leçon à tirer de cette histoire est la suivante : s’il ne faut jamais compter sur la fulgurance d’une standardiste en milieu administratif, il ne faut jamais non plus envisager de se laver les mains avant un rendez-vous important.

Ma conclusion personnelle : ne plus accepter de rendez-vous au ministère à des horaires matinaux.
À moins qu’il ne faille en conclure de ne plus me déplacer en scooter - pour n’avoir plus à me recoiffer, ni ne me laver les mains ??
Ou alors de continuer à rouler en scooter, mais de ne jamais plus fermer le verrou des toilettes d’un ministère ?
Ou alors de n’accepter d’entrer et de fermer le verrou de toilettes, dans un ministère, tôt le matin, qu’à l’unique condition de s’y trouver en même temps qu’une autre personne, si possible aux larges et fortes épaules ????!!!!!??

Je n’ose ici vous raconter la risée que j’ai procurée à mon équipe une fois rentrée au bureau.

Humf ... vous me croirez enfin si je vous dit qu’en ce moment, je n’aspire qu’à une chose : cultiver des prunes d’ente au fin fond du Gers ??!!

En vous remerciant... Bonsoir !

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